e-ffusion, magazine en ligne réalisé pendant le confinement du COVID-19 par le Centre des arts actuels Skol (publié le 21 mai 2020)
Nicole Panneton, Taire ce qui ne peut être dévoilé – Dérive, 2019 (vidéo de 3min13, Canada, GIV)
23e Rencontres internationales Traverse, Hors-champ Hors-cadre: qui regarde?, Toulouse, du 11 au 31 mars 2020
D’emblée, est énoncée l’injonction à laisser non-dit un indécidable – injonction à l’infinitif, ce qui laisse le temps au temps et inclut tout destinataire. En clausule, un inter-titre en clausule expose le projet tenu. Toujours à l’infinitif, il implique un « ici et maintenant » au-delà du moment où s’est actué le geste dans ce lieu « vitrine ». Un toujours déjà-là et toujours encore-là rétabli à chaque lecture et du texte et de la vidéo ce faisant, il implique l’artiste elle-même et ce de quoi elle fait œuvre.
Cinq lignes/vers égrènent la nécessité artistique qui la porte ; elles doivent être citées en entier : dériver/explorer et apprivoiser un lieu/habiter et être habitée/laisser surgir dans l’être ici maintenant/faire le cumul des gestes, mots, dessins et objets.
Sans majuscule, sans point final, elles condensent les petits riens qui, ensemble, font film, dans une fréquente sinon constante superposition des éléments. Les murs vert céladon avec bandes blanches et marques d’usure, le plancher réveillé par le passage du pas, les pages d’un carnet décelant leurs croquis d’éléments divers mais s’y ressemblant ; mouche renversée à la forme ramassée qui la fait proche des boules de papier/des fleurs séchées/des bourres de laine ou une sorte de rouleau tout aussi noir comme de la laine embrouillée ; feuilles soulevées par le ventilateur dessiné aussi sont… au même titre que le très gros plan de cette grosse laine ou de l’œil fort ouvert en amorce. Ils se succèdent, s’appellent.
Un mot sans sa première lettre se distingue près de la femme, « loignement », il atteste une quête faite ailleurs en solitaire mais rapportée en cet espace. Nicole Panneton en cette vidéo, monte des traces de sa « dérive », sa forme de réponse au projet d’art communautaire Des mailles et des mots, chez Action Art Actuel, Saint-Jean-sur-Richelieu.
La vidéo suggère des actions performatives comme ce « tour du propriétaire », écho adouci d’un des films Fluxus, dessinant le champ par les pieds ; un pied se pose, est rejoint par l’autre qui bouge qui est rejoint, en une sorte d’arpentage. La vidéo l’inclut, elle, cheveux blancs, sourcils épilés en fragment, au même titre que ce qu’elle glane et qu’elle reconnaît comme objet de son action, sans hiérarchisation dans l’ensemble de la superposition avec des marques du lieu comme cette bordure de la fenêtre ou ce tuyau. Tout est trace visuelle, trace de l’action, rébus performatif.
Simone Dompeyre
Présidente et commissaire artistique de Traverse
Le 7e Sens, TouVA, Anne Bérubé, Victoria Stanton et Sylvie Tourangeau, Sagamie édition d’art, ISBN-978-2-923612-54-6, 2017, Artiste 23-24
Le pouvoir de l’immobilité, article rédigé par Sylvie Tourangeau, Espace Art Actuel, Faire statue, hiver 2017, pp. 62-67
When trans walks into action, mission and formation, Performance Research on Trans/Performance, article rédigé par Victoria Stanton et Sylvie Tourangeau et déambulation graphique par Evelyne Bouchard, Diane Dubeau, Julie Laurin et Nicole Panneton, ROUTLEDGE Taylor & Francis Group, Volume 21, No 5, octobre 2016, pp.134-137